27 nov. 2013

Les grandeurs allongées

Je vis dans des paysages d'écritures, de traits verticaux majestueux. Des failles s'allongent chaque jour devant moi, lointaines et impossible de les toucher dans les falaises de calcaire que seule l'eau transperce.

Je vis dans des courbes hallucinantes de beauté. Chaque matin je les retrouve des yeux; vertes, bleues, ou noires, blanches immaculées. Les collines croisent les sentiers, les ondes s'allument comme un tissage de matières entrelacées. Ondulations amoureuses, traits de pinceaux de verdure, bosses et tendres courbes que la montagne a épargnées. Nous a laissé ces hamacs de cours d'eau, de prairies, de forêts qui penchent.

Mon paysage pousse à l'envol, invite à le dessiner, comme un accordéon de crayon, étirer sur un papier les corps cachés, endormis, les danseuses évanouies. Mais dès la main posée on sait que c'est imposture, défi de feu, géant de glace qui regarde le tout petit le recopier plein de ratures. Peu importe on garde l'espoir. Chaque jour  une nouvelle pointe de roche dépasse des nuages.



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25 nov. 2013

Salée

Où sont passées mes larmes , bon sang où ai-je pu les laisser ?
J'ai tant besoin d'elles. Voyons, elles sont des aliées ! Pourtant de mon vaisseau on dirait qu'elles ont délaissé l'abordage.
Je les vois en coin, sur une île qui me nargue. Mais vers moi ne reviennent. On dirait que j'ai tant creusé pour les enterrer. C'est bien malgré moi que cette disgrâce m'assaille.
Où sont passées mes larmes dont je n'ai plus si peur et que je réclame aujourd'hui ? Celles qui bordent la nuit, des canes dans le brouillard, des petits poucets pour faire voir. Je voudrais bien encore qu'elles m'ennuient, me ruinent le portrait et apaisent avec bruit.
Qu'elles viennent et fête je leur ferai. Quand elles partent il fait toujours mieux jour.

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23 nov. 2013

Divagations ce midi

D'un bouquet sur une petite planche posée verticalement, j'ai fait un animal aquatique à l'horizontal.
Les planches se remplissent et se transforment. Changent de bord, ce qui est dessous sert à ce qui est dessus. Le mélange des couleurs n'est pas toujours heureux. Tous les mélanges ne prennent pas jolie envergure.
 Hier au téléphone je parle à une amie de la vie à deux. Disons qu'au point de départ chacun a son appartement ou sa maison. Et qu'à un moment des vases communiquent, cela fera-t-il un beau bouquet ou un méchant feu d'artifice ? L'amie tente des fins de semaines hors de chez elle, mais "chez lui ce n'est pas chez toi" lui dis-je. Comment ne pas s'ennuyer chez un autre dont on n'a même pas la clé ? Comment ne pas s'ennuyer ensemble en ayant nos clés ? Comment vaquer librement ? Vaquer librement. " Ce que l'un aime, l'autre peut ne pas l'aimer ou pas de la même façon". Et que chacun fasse et aille et aime comme il veut, avec ou sans l'autre : famille, amis, sorties. J'ai l'air de décliner des évidences pourtant, je sais, cela m'a pris du temps moi aussi. Du temps et un autre, un qui comme moi le pensait mais sans le dire et attendait qu'une
 emmerdeuse comme moi mette ses choix en avant. De nos familles nous avons tout de suite discuté, fait quelques tentatives et retenu surtout, surtout qu'on ne se forcerait jamais et que l'amour n'en pâtirait jamais. Pourquoi faudrait-il aimer la famille de l'autre ? Pourquoi devrait-il avoir envie de voir ma mère, ma soeur, mon frère ? On s'est dit " Seulement si ça nous fait plaisir, si ça ne nous pèse pas". On s'y est tenus. On s'en foutait de ce que penseraient les uns ou les autres. Aimer est affirmer sa différence. N'est pas se couler dans un moule ou des traditions, pas si cela fait régresser la joie d'être ensemble.

Tu me diras que c'est la peur. Tu me diras que je ne connais pas la joie et la solidarité des repas de famille du dimanche. Tu as raison. Tu me diras l'égoïsme, mais ça je suis couverte de la tête aux pieds, même le jour de la mort de ma mère ma soeur a trouvé moyen de me blâmer, en toute mauvaise foi de m'affliger de son propre poids, de ses propres manques d'indépendances. On peut tout me mettre sur le dos. Je dis juste que l'amour c'est pas facile. Je dis la lâcheté du couple, du vivre ensemble et les efforts pour ne pas s'y noyer sec. Etre libre et créatif, être aimants et non propriétaires, être très con et drôle. Ne pas avoir peur de la mort et de la maladie en solitaire, manquer de courage pour partir, partir et laisser puis revenir. Je dis juste que c'est très difficile d'aimer et encore plus de cohabiter. Ce qu'il nous faut c'est des espaces où faire ensemble, rire et s'écouter, et des espaces où être seul ou du moins sans l'autre.

S'accompagner, en somme, au fil du temps. Ce qui n'est pas du tout ce à quoi l'on pensait lors du premier baiser.

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14 nov. 2013

Dernièrement

J'ouvre cet article sans savoir ce que je vais y mettre. Le but étant de faire le point sur mes dernières peintures et je ne sais plus ce que j'ai fait. Démarré, ou fini.
Voyons voir dans les photos...

Pour les préparations de l'atelier du mardi j'ai ouvert un cahier
Je m'amuse souvent à fermer la page quand ce n'est pas sec. L'empreinte se fait de l'autre côté.




Petits essais pendant l'atelier, vite fait.




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A la maison, j'aime beaucoup travailler sur le bois et il faut dire qu'on a des bouts de vieilles planches dans le garage


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Je me suis bien amusée.
Sur cette planche d'abord de la gouache.
Puis du pastel et du cirage incolore et j'ai gratté
Puis de l'huile blanche et regratte !


Toujours pour l'atelier à la maison citoyenne, je viens de faire un essai en miniature pour un projet d'arbre sur un grand carton. L'idée est de coller sur les branches, à partir d'un catalogue de rosiers.



J'aime bien l'arbre nu, tel que.
Mais c'est pour l'atelier et nous faisons des collages de papiers déchirés
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Trop chargé ?
Je dois trouver des idées simples puisque les dames de l'atelier sont novices en collages.
 Ici on met à chaque fois trois petits bouts de papiers déchirés.

Et voilà un article bien décousu de bric et de brac, mais pas en toc !

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7 nov. 2013

Kara-kami

Un jour dans ma boite aux lettres, il y a deux ans,  un paquet du Japon.
En venant ici et via face book aussi et la boite mail, Béa m'avait demandé si je voulais des papiers de chez elle. "Oh la la mais juste le contenu des pub dans ta boite serait un bonheur !"
Il y avait bien plus que cela dans son paquet. J'en ai pleuré.

J'ai encore une grande partie de ces journaux japonais, photos kitsch de pub en couleurs flashy,  illustrations traditionnelles, petits papiers colorés, motifs sur les sacs qui enveloppaient le tout.

Aller au Japon est le seul projet de voyage qui me tient encore à coeur. Le seul pays que j'aimerais ne pas rater.

Je vous mets un article de Béa sur encore et encore des merveilles nippones.

http://nagoya-en-francais-2.over-blog.com/2013/11/exposition-de-kara-kami-mus%C3%A9e-tamesaburo.html

3 nov. 2013

Pas de lundi

Depuis une bonne année je ne travaille pas.

Fin de CDD. Au début j'ai eu peur de mijoter dans mon jus, je n'avais pas choisi de cesser une activité qui me passionne. Je me suis lancée dans la peinture et j'ai participé à un atelier au village.

L'année scolaire s'est écoulée dans l'énergie de la création, avec l'atelier démarré avec des femmes analphabètes, bénévolement, sur le lieu de mon ancien boulot. Une expérience extraordinaire dans laquelle j'ai investi totalement. Pôle emploi n'a cessé de me dire que je devais me faire financer et ne rien créer sans rétribution. C'est une idiotie. On doit d'abord créer, pour soi et les autres, durant une période de chômage. Exposition en mai. Un succès. Une forte émotion qui m'a fait pleuré à l'inauguration.

Après l'été j'ai appris qu'un nouveau contrat me serait proposé, sur 18 mois. Temps partiel. J'ai eu un moment d'hésitation à l'idée de perdre mon temps libre, qui est une joie. Par ailleurs je souffrais de ne plus travailler auprès de ces femmes étrangères, dans un cadre souple, très créateur aussi. On se rouille un peu quand on ne bosse plus, on devient fainéant, Oh se lever le  matin ( trois matins pour moi)  !? Oh prendre la voiture pour 20 mns de route glacée en hiver !?! Je sais que c'est la dernière fois que je vais travailler "autant" c'est à dire 13h payées - mais en incluant les longues coupures du midi sur place, finalement 20 h - plus les prépa à la maison, en bibli, etc. Ces préparations de "cours" sont stimulantes pour la préretraitée que je suis, cela me motive. J'ai souvent le sentiment de ne pas exploiter mon cerveau suffisamment. Cela lui remettra de l'huile là où il faut.

Après ce contrat j'arriverai sur mes 56 ans, j'aurai deux ans d'assedic devant moi. Ce sont des considérations qui sont incroyables à penser mais le sujet de la retraite est LE sujet dans ma maison. Non seulement sur le plan financier mais sur le plan personnel, organisation des temps, des vies communes. Or donc, c'est moi qui vais m'y coller pendant que l'autre va profiter de son temps libre, enfin. 

Il va y avoir des lundi. Je le dis parce que c'est dimanche. Combien de lundi, combien de capitaines, combien de matins où on resterait bien au lit ? J'aime travailler avec le sourire et apporter du sourire au travail. Je ne dis pas que je n'ai pas de mauvaises humeurs,ou, plutôt, qu'il m'est difficile de ne pas dire ce que je pense. Au travail on pense, mais parfois se taire est bon. Je ne sais pas. Je suis trop autoritaire. Je suis décidée à prendre ce CDD, le dernier d'une carrière totalement cahotique dans un tas domaines professionnels, je suis prête à le prendre avec le sourire au delà des râles. Des lundi à moi sans sortir du lit si ça me chante, j'en aurai toute ma vie ensuite. J'ai toujours préféré les contrats provisoires à ceux plus définitifs. Je me sens libre et surtout on sait quand ça termine. Ce qui permet de sourire et moins râler. On sait quand la porte s'ouvrira sur une autre liberté. 

Un lundi, donc, d'ici quelques semaines, je serai dans la vague des travailleurs, provisoirement.