27 nov. 2011

L'absence

Il n'y a plus personne pour m'aimer comme tu m'aimais. Voilà pourquoi. Voilà que. 
Je suis descendue vers le ruisseau, dans le creux humide de buis et les hauts arbres. Je me suis assise sur la grosse pierre et j'ai pleuré. Je ne sais pas où tu es. Je n'arrive plus à te prendre au présent, je ne sais plus où tu es. Je te vois mort dans ton joli carton, dans mes bras dans ta couverture turquoise. Un instant j'avais pensé me la garder et Lui a dit, pas question, bien sûr, tu pars avec ton doudou, avec moi. Tant de fois. Tant de fois sur mes genoux.
Il n'y a personne à aimer comme toi. Sans réfléchir, sans regrets, sans arrière-pensée, sans mentir, sans se retenir, sans être déçu. Assise sur la grosse pierre je t'ai cherché. Je ne sais pas où tu es. Tu n'es pas encore revenu dans un calme pour m'apaiser. Tu es encore entre deux mondes et j'ai peur de te retenir dans une impasse. Je veux te libérer de tout ce qui te retient d'aller vers moi encore. Il faut traverser ensemble la douleur et le choc de ne plus se voir chaque jour. 

Bien sûr la vie est beaucoup plus simple sur le plan matériel et nous en rions Lui et moi. Tu étais partout, il fallait des litières impeccables, tu miaulais la nuit toutes les trois heures pour avoir trois croquettes, juste pour qu'on s'occupe de toi et nous on se levait, on te causait, tu venais nous caresser, affirmer ta présence, ton autorité. Pas un geste qui ne t'échappe, pas un mouvement, pas une décision que tu ne saches pas.

Il y a quinze ans je n'aimais pas les chats, pas plus que cela, jamais je n'aurais pleuré sur vous. J'ai vu ton maître pleurer un jour, sangloter, éperdu. Je ne connaissais pas ce monde. Il y a des voyages, comme ça, que l'on fait. Tout le monde ne les fait pas. Cela vient lentement, sans même qu'on s'en aperçoive et un jour on a changé. On est sur une autre rive, on passe des ponts, on se laisse dériver.
L'amour est patient quand nous sommes inconscients. On traverse des mers, on croise des forêts, on  tangue, on refait ses bagages, on repart à la nage, on écoute des musiques qu'on ne pensait pas écouter. De nous l'amour ne fait qu'une bouchée.
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22 nov. 2011

Mardi

Voilà mon petit ami, ce mardi 22 novembre et la semaine dernière tu entrais dans ta cachette sous terre sous les framboisiers.
Nous avons pensé à toi hier soir. Nous avons allumé encens et bougies. Nous avons encore parlé de ta vie, de ta présence mignonne, de ce soir là où tu t'es couché en travers de mon torse et où nous nous sommes endormis ensemble, ronronnant, chose rare. D'habitude tu allais sur les jambes de Lui car tu sais que les miennes me font mal avec ton poids.

Et il y avait ces moments où tu revenais vers mon corps le soir, en haut, parfois moustaches contre moustaches, parfois sur mon bras, sous mon aine. Et ce soir là, un soir pas comme les autres. Je tombais déjà dans le sommeil quand tu t'es rapproché, j'ai bien vu ton oeil sur le côté, malicieux. Tu savais toujours exactement quand nous nous endormions, à la seconde, au souffle près. Alors ce soir là, en septembre de cette année,  tu savais que je m'abandonnais et de mon aine tu es remonté sur mon flanc puis délicatement, me sachant consentante, tu as grimpé un peu, puis tout à fait, progressivement, te faisant tout léger.

Etalé de tout ton long en travers de moi, au dessus de mes seins, tu t'es relâché complètement, suivant mon rythme ralenti, partageant mon souffle. Tu me savais encore consciente et irradiée de bonheur de te porter sur moi, en moi dans mon sommeil, notre sommeil de ce soir là. Je me suis endormie dans la félicité et une détente totale, emportée par tes ronrons vainqueurs et bienfaisants. Oui, bien faisant. J'en ai encore le goût dans tout mon être, et mon corps en résonne comme d'un moment magique, un frisson intemporel entré en moi, par toi.

Ainsi je te garde maintenant, étalé sur ma poitrine en dessous du cou, telle une écharpe de bien être qui savait tout, qui saura tout. 

16 nov. 2011

Le premier mercredi sans toi

Mon petit chat chéri je me réveille dans la nuit et je te pleure, je me lève au matin et je te pleure. Je me suis couchée sur le tapis, tu sais en bas, le nouveau tapis pakistanais qui t'a immédiatement plu et où tu as passé une partie de ta dernière semaine. Mon petit chat chéri nous te pleurons de toute notre âme et je me fous complètement de savoir ce que quiconque en penserait. Mon petit chat chéri j'ai tellement réalisé ce matin que les petits dejeuners étaient vides. Plus de toi qui tourne autour du fauteuil, puis me saute sur les genoux, puis se niche caché dans mon coude et ronronne plus fort que la radio.
Mon chat chéri nous avons besoin de nos pleurs. Ensuite, la vie se lève dans nos coeurs et d'autres pensées d'autres envies peuvent sauter sur nos genoux et se nicher au coude. Tu m'avais vu perdre notre Princesse adoptée par surprise à l'été 2005. Tu sais bien comment je suis. Tu n'avais pas vu ton maître en 1997 pleurer sa Mimine, c'est grâce à cette douleur insoutenable que nous avions décidé de reprendre deux et non un chat une année après. Toi et ton frérot à l'été 1998. C'est un peu grâce à Mimine, tu vois, cette chatte intelligente et superbe, morte elle aussi, comme Princesse, sur la route, que tu as vécu avec nous ? Va savoir ?
Il te fallait, et ta place tu l'as prise immédiatement, tout cool tout de suite, installé tout de suite sur un coussin roulé, petit chaton dès ton arrivée à la maison. Tu fus chez toi à la seconde, sans inquiétude, alors on a dit " Il est cool lui, on pourrait l'appeler Couli ?"

Je revois ton visage, ton museau pointu, tu as toujours gardé un air de chaton. Les yeux soulignés de blanc et ta "cravate" blanche au cou. Tu étais présent sans cesse autour de nous. Une vraie concierge, on disait. Tu observais tout, me suivais comme un petit chien, ronronnais dans les toilettes nous caressant les jambes, "prenant ta douche" avec Lui. Tu restais avec Lui dans la salle de bains, heureux sur les pantoufles, ronronnant non stop. Tu avais ta serviette de toilette et il te massait avec ta serviette, te parlait, faisait semblant de t'essuyer partout avec moultes commentaires. Je ne sais plus comment mais  c'était arrivé comme cela, dans le précédent appartement, tu étais entré dans la salle de bains et tu attendais quelque chose après notre douche, dans la moiteur de la pièce, et nous avions compris, tu avais tout de suite adoré ce moment avec une serviette autour de ton petit corps ravi.

Voilà ma bestiole chérie, ce matin Lui et moi nous t'avons pleuré fort, longtemps. Je ferme les yeux et je te vois. Je les ouvre et je te vois. L'amour et la dépendance ne comptent pas le nombre de pattes, ni de poils, ni de moustaches. Heureux ceux qui mettent la distance entre vous et nous et qui ne savent pas, comme ceux, au boulot, stupéfaits de me voir dévastée. Nous faisons partie d'un groupe d'êtres fous, qui n'ont besoin d'aucune case où ranger et classifier les êtres vivants selon leur espèce. Tu sais que j'avais été élevée avec la peur des animaux et que je suis vraiment fière d'avoir évolué. Tous mes fiancés aimaient les bêtes et m'ont peu à peu montré comment ne pas les craindre, d'abord, puis vivre avec eux. Bien sûr, Lui, est le plus fou, le plus gaga. Tu te souviens qu'au début je lui avais dit " Mais on embrasse pas les chats !!!" En le voyant, horrifiée, vous faire un bisou sur la tête.
Et lui de me répondre
- Ah bon ? Qui a dit ça ? C'est interdit ? Pourquoi ?
Et moi, quelques mois après, de me voir vous embrasser, noyée de joie et d'affection, ayant brûlé tous les préjugés dont les humains, si prétentieux sur leurs deux pattes, se couvrent.
Tu m'as tout appris mon Couli.

Tu ris, mon chat chéri ? Oui. tu ris.
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15 nov. 2011

Hommage à bien plus qu'un ami

Pour toi, mon petit chat chéri, j'ai écrit.

le premier matin

Pour toi, pour lequel j'ai dessiné ce matin et écrit des mots sur une belle boite en carton avec ton nom, Couli, et mise en terre. Recouverte de nos fleurs. Toi qui aimais tant me voir jardiner. Toi qui ne me quittais jamais et qui m'a quitté.

11 nov. 2011

A l'hôtel du chat

J'ai rêvé de mon chat. Le Couli qui agonise à la maison depuis lundi, officiellement depuis lundi. C'est le véto qui nous a plongé dans la détresse avec des examens de sang. Je hais les vétos.

Mais cette nuit c'était belle vie. J'étais nomade de métier, j'allais d'hôtel en hôtel dans une belle ville de bord de mer. Je rêve souvent de cet endroit et je garde un doute : y suis-je allée dans la réalité ? Il me semble qu'elle recoupe plusieurs endroits, des criques normandes, des rues du Havre à Sainte Adresse ?, une ville en pente vers la mer, des lacets pour accéder aux plages sauvages et fouettées par le vent. Oui, cet endroit me connaît, quelque part dans une vie, quelqu'une parmi les miennes.

Je dois quitter un hôtel, ce n'est pas marrant. Etre clochard céleste a des désavantages quand on n'a pas de porteur. C'est le bordel des sacs sur des perrons. Un autre hôtel à proximité m'accueille. Celui là aussi est récurrent dans mes rêves. Et dans la vie ? Il est plutôt exotique, voire asiatique tendance Bombay ou Bangkok. Un grand hall, puis des escaliers originaux, en bois et  larges colimaçons, et plusieurs paliers pour accéder aux chambres.

Là, dans le hall, presque installé dans un fauteuil, Couli m'attend avec son adorable  triangle de poils blancs au cou, presque une cravate dans ce lieu simple mais distingué. Ah tu es arrivé !, très bien, lui dis-je et il vient vers moi à pas dignes et hauts sur pattes. Nous allons prendre la clé de notre chambre et Pépito, son frangin, le deuxième chat de la maison ( et celui là va bien) nous rejoint aussi, il attendait un peu plus loin. Au bar de l'hôtel peut être, car c'est un boulimique et a dû chiper des cacahouètes.

Ainsi je me réveille, heureuse de cette vie de rêve. Je veux garder l'image de cet hôtel et de cette ville, avec ces rues vers la mer et mon Couli en pleine vie, en pleine forme, qui m'attend pour aller chercher la clé de notre vagabond de logis. Oh La belle, belle, vie !
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9 nov. 2011

Les chats qu'on aime

Mon chat va très mal, je l'ai écrit ici
Rien d'autre ne compte évidemment
Toi qui n'as jamais été proche d'un chat, en osmose, en joies, en âmes mêlées, je t'envie aujourd'hui. Tu ne connais pas la douleur de les perdre.

Il faut croire qu'en amour, quel que soit l'être aimé, quelque soient le nombre de pattes, d'oreilles, de poils, il faut croire que la douleur est proportionnelle à l'amour donné et reçu. Et le chagrin sans pitié, te dévore de la tête aux pieds.
La tortue légère ne mange plus, pleure de tous ses yeux, avec et sans ses lunettes. C'est comme ça qu'elle aime.

De ce qui remplit, fait vivre et mourir, on ne peut se protéger .

4 nov. 2011

En pluies dans ma bouche

Cette nuit le vent n'a pas molli, force sud sud-est avec tempérament et chats roux, et un bruit fort claquetant dans la cheminée, clapotis non encore définis à vous réveiller un buffle mais Lui ronflait. Comment font-ils, les hommes pour être des hommes ?

Pluie sans mollir, de fermes à agitées, réellement en partouze dantesque sur ma terrasse couverte mais néanmoins trempée jusqu'à la petite culotte , c'est à dire à la limite, tout au fond de la dite terrasse, où sèche le bois . On a frôlé l'apocalypse ? 
Non on  avait déjà nagé dedans, en soirée, en découvrant, Horreur !, qu'un chat un peu malade avait fait ses besoins sur le tapis pakistanais tout neuf, tout resplendissant. J'ai râlé sans discontinuer en nettoyant à coups d'éponge, de savon, de chiffon, et de détachant chimique que l'ancienne propriétaire avait laissé. Qu'elle en soit remerciée même si, en règle générale, elle n'a quasi rien laissé d'intéressant, au contraire. Mais j'arrête de râler. Ceci dit je suis entrain de prendre la ferme décision de ne plus avoir de chats après ces deux là. Lui ne dit rien mais pense le contraire. 

C'est ainsi que nous partîmes faire les courses vers 11h, grand parapluie en main. J'ai eu des envies de palette de porc, fumée ?,  pourquoi pas. La dame du rayon charcuterie m'a convaincue. Vous n'avez pas plus petit ? Non, elle a dit. Inconsciente je suis devenue, emportant ce gros bout de porc. Et ça se garde bien hein ? Y'a intêret.

On est revenus avec des projets culinaires, en premier lieu un cheese-cake avec des "carrés frais G....". Mon père les aimait, je me demande pourquoi. Je n'y ai jamais gouté. Tout ce qui est mou et provient de la vache me donne la nausée. Mais je veux faire un cheese-cake avec. J'ai un souvenir de celui de P., ma coloc d'un temps, au Laos. Elle avait acheté un fromage occidental, genre brie ou je ne sais pas. Elle ne m'a rien dit. M'a présenté le gâteau tout frais qui était un délice. Je n'en n'ai jamais mangé d'aussi bon. 

Pourquoi cela me rappelle-t-il le dernier carrotcake dégusté sur le Marché J.Talon à Montréal ? De ces gâteaux anglo-saxons que je ne sais pas encore bien faire, rien à voir avec the Original. Ma part était si grosse en cet été 2007, seule attablée au restaurant-café, avec vue sur le marché ( magnifique endroit, de tout ce qui se mange, de partout, de quoi y passer ta vie), je n'ai pas pu finir. Une part d'ogre. Je voulais que ma vie s'arrête en ce lieu béni . A une table de café, avec le goût sucré du gâteau en bouche et derrière la vitrine toute la vie du monde, des montagnes de fruits et de légumes, des ananas épluchés à la minute  devant toi dégoulinant de leur miel.

Il faisait beau, tout était parfait et moi inconnue autant devant que derrière la vitrine, avec à peine cette pointe de nostalgie que te donne la certitude de l'unique, du précieux, qui va à nouveau changer d'adresse dès que tu te lèves pour sortir, et qu'il faudra encore aller chercher autre part, alors qu'elle était là. Elle. La fin en soi. La suffisante.
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Tiens, il re pleut..
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