30 mai 2011

Le dernier jeudi de l'atelier du calendrier



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Jeudi 26 mai, "L'atelier du calendrier"( thème des séances du matin avec un groupe de femmes non scolarisées désireuses d'accéder à la langue française ) a clôturé sa saison 2010-11!

J'ai étalé un rouleau de papier peint sur les tables alignées et chaque personne, en face à face, a écrit la date de notre dernier jeudi et a décoré au milieu ( là où j'avais mis des gegko et des spirales...)

J'ai sorti notre unique tube de peinture ( violette) pour l'occasion.

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Je voulais accrocher la tapisserie à la verticale mais elle était trop longue.

Ces dames sont donc un peu contrariées de voir une partie des mots mis à l'envers, je les comprends. Elles qui se donnent du mal pour écrire dans le bon sens !

C'était donc la dernière oeuvre collective. Nous avons rempli l'affreux mur jaune de la salle, les quatre murs même !, durant toute l'année scolaire.

Il faudra trouver d'autres idées pour l'année prochaine !

29 mai 2011

de l'action !!



Y'a des blogueuses, et des blog-gars, dont j'ai du mal à me passer...On a échangé, voire même posté, ou même thé, dis donc !! Il s'est passé des choses entre nous et moi j'aime.

Cette semaine j'ai demandé des nouvelles à deux petites perles, dont je trouve que les blogs perso ronronnent un peu, enfin je me demande, voire une qui a quasi déserté....tiens donc ?

Je les connais ces filles là, c'est qu'elles mijotent ailleurs, c'est pas possible autrement ! Bingo ! Et quelle joie de les lire ailleurs, mais pas sur du personnel, sur du collectif, dans des blogs d'associations où elles sont actives.

J'ai eu envie de refaire une blog-liste mais spéciale. Où on peut rester clando, noyé dans les infos réjouissantes de la vie citoyenne et moi j'aime bien. C'est donc un début, j'ai mis un intitulé " les blogueuzes ( et des gars aussi..)  bougent !"....je me demande si ma récolte ne fait pas QUE commencer. Si tu es dans une assos ou un truc, un machin avec des gens et que ça fait du bien...tu me donnes l'adresse 
( latortuelegere@gmail.com) ?

On fera notre printemps révolutionnaire, nos rendez-vous d'indignés, nos folles journées de chez nous et de partout ! ? Clando hein ? En douce, of course.

27 mai 2011

L'amitié défaite

Je ne sais pas trop quand je t'ai vu la première fois, je ne sais pas trop pourquoi nous sommes tant unis bien des années après. 
Bien des années.
Nous travaillions dans le même camp de réfugiés, j'étais très inquiète de ce que j'allais y faire. J'avais la trouille et l'appétence. Tu avais cette nonchalance et l'expérience.

Je ne sais pas toujours aussi ce qui uni et désuni des amis. L'amitié est somme toute bien fragile. Il y a deux mois j'ai compris que j'avais perdu des amis, que vraiment, nous n'étions plus ensemble même de loin, surtout de loin, la chose rare dont j'ai besoin. Rare et difficile, exigeante.
J'ai bien fait. J'ai voulu tester, être sûre. Il y a pourtant une chose simple c'est quand tu ne reçois plus de signes, plus de réponses à rien, ni courrier, ni téléphone, ni e-mail, etc. Quand tu ne sais plus rien de leur vie, quand tu apprends, presque par hasard, qu'il y a eu une grande fête pour un âge canonique et que l'on n'a pas pensé à toi. Même, tu étais éliminée d'office parce que trop solitaire " Tu n'aimes pas les groupes, les assemblées de gens" te répond-on pour te dire "Tu n'avais rien à faire avec nous en ce jour de fête".

(Moi qui suis une séductrice bout-en-train grande danseuse devant l'Eternel ! )

Alors je voulais être sûre. Avec ceux qui ont partagé l'expatriation avec moi et la vie d'Asie, je veux être sûre car ils sont rares et chers, nous avons des secrets.

J'ai dit "Je viens". Six ans après s'être croisés un soir chez eux. Depuis nos vies ont beaucoup bougé. Depuis j'ai changé, je n'en doute pas et ils me savent beaucoup plus fragile et casanière. Ma vie ne leur parle guère. Leur vie de famille pleine de principes moraux n'est pas non plus de mon genre mais je m'en fous.
 En serions nous à nous juger ?

J'ai dit "je viens" et j'ai reculé. Un retard de train, la trouille devant l'attente dans une ville que je déteste car elle m'a coupée en morceaux et je ne retrouve rien. La trouille devant des foules, une peur panique, un besoin de sécurité, j'ai fait demi tour. J'ai sonné mon glas. J'ai ensuite fait sonner le téléphone pour l'entendre. Entendre le jugement, les questions sournoises et inquisitrices sur ce que je fais de mon temps, de ma vie, sur mon utilité quoi...Et l'incompréhension totale devant une fille inconséquente, quasi malade parce qu'elle fait demi-tour au lieu de rester trois heures dans une gare. Oui, cette fille est Barjoland, il n'y a plus rien à en espérer de clair et définitif.

L'amitié n'aime pas dire ses points de ruptures. L'amitié aime le silence, je crois. Et moi je ne sais pas cette amitié là. Je ne sais pas lui faire du bouche à bouche pour des morts annoncés. Je lui demande autant qu'à l'amour, je crois. Et il faudra bien que je le comprenne tout à fait, seuls les barjots amochés peuvent aimer être à mes côtés.

Comme toi, comme toi.

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22 mai 2011

Valse creuse.

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Vendredi j’ai voulu déraciner un arbre. Un minus robinier qui faisait à peine un mètre de haut et qui s’était collé à un vieil arbre. Non, ça ne va pas. J’ai décidé de prendre position. Je m’affirme dans le jardin. Je me suis pris une tronche de propriétaire complètement conne sous trente degrés à l’ombre, un quasi midi, la parfaite cruche. Une pulsion, me demande pas. Y’a des fois où j’ôte toute intelligence de mon cerveau, toute. Elle était encore là, l’intelligence, quelques minutes avant, disons, trois, quatre minutes, et puis soudain l’action têtue s’empare de moi et je n’ai plus de retenue.

Je suis allée chercher le seul objet que j’avais, un truc pas approprié, je savais, mais là aussi c’est un genre de stratégie avec mon imbécillité titanesque. Exemple : la veille j’avais posé du jonc de mer au sol, dans le bureau,  à l’aide de vieux ciseaux. Cherche pas. J’ai une ampoule dans la paume de la main droite maintenant. Cherche pas.

Une fourche donc, enfin une chose à quatre morceaux qu’on enfonce au sol, une fourchette géante, si tu veux. Et j’attaque la bête. Je lui cause avec mon esprit. Je vois qu’elle comprend rien. J’ai un peu honte car je sais que je fais une connerie. Mais c’est foutu, dans ces cas là. Je suis prise par ma bêtise, j’insiste. Donc, je lui coupe les vivres. Je lui coupe des petites branches. Je lui dit que c’est pour souffrir moins après. Je lui explique que je vais le replanter ce bébé acacia. En pleine chaleur d’un été en mai, à midi, je lui raconte cette histoire là. Genre «  tu seras heureux ailleurs, mon fils ». Maintenant tu comprends pourquoi j’ai pas voulu d’enfant.

Je creuse. Je fouille, je tournicote. D’un côté, de l’autre, j’entre dans des entrailles. Je vois bien que je n’ai rien pour moi. C’est sec, c’est puissant. Je suis face à plus fort. Je creuse, je tournoie, je danse autour, j’enfonce ma fourchette géante mais surtout je danse autour, péniblement, honteusement. Je me dis «  Merde la voisine, je ne veux pas qu’elle me voie entrain de déconner comme ça ». On a à peine fait connaissance, c’est une mégère du coin et son balcon donne précisément sur cette partie de mon jardin, qu’elle reluque sournoisement.

Cette pousse n’a rien à faire là, il faut que je soies autoritaire dès le début. Je suis une récente propriétaire et j’ai envie d’être totalement stupide. L’arbre se défend. Il a peu à faire. Il a tout pour lui. Il a même des alliés sous terre. Je n’en reviens pas de trouver tant de résistances. C’est un écheveau, des ficelles de racines, un enchevêtrement qui me dépasse totalement. Je ne suis rien. Plus je creuse moins je descends. Je remue de la terre sableuse par touffe, j’aère la terre, c’est tout ce que je fais. Le robinier se fend la gueule. Des cheveux de sorcière l’entourent et me jettent sorts sur sorts. Je me débats sans effet dans un filet serré, mailles après mailles, bien avant moi, bien avant que j’arrive, bien avant, même, que je ne connaisse ce lieu et ce monde.

Il penche, il penche et ploie. Moi je suis au bout de mes moyens. Donnez moi une pelle, une pelleteuse, un marteau piqueur, un tracto-pelle….Mais là quoi ? Le mini-arbre ne bougera pas. Le combat vital est lancé. J’ai soudain un émoi, un remords, un passage à vide. « Je vais le tuer » me dis-je. Un instinct de meurtre. Je suis allée trop loin. Je suis foutue moi aussi. Je nage dans la panade complète, je suis dans la mouise. J’ai deux solutions. La première ne me vient même pas à l’esprit : arrêter le massacre. Reculer, raison garder. Personne ne m’a vue. Je peux faire volte-face. Laisser en place cette joyeuse motte de terre bien remuée et abandonner, en quelque sorte…Mais c’est faire fi de moi et de mon désir de puissance. Quand tu as commencé à te ridiculiser c’est dur de renoncer.

La deuxième solution je la prends, criminelle, mauvaise tête. Les cisailles, et je coupe, le plus loin possible, le genre de petit tronc, racine épaisse que j’ai réussi à atteindre. Car pour le reste, l’essentiel, le robinier a tenu bon. L’homme à abattre est enterré loin, aucun de mes yeux ne le voit. Je ne vois rien. Je n’ai rien vu, je suis complètement inutile et inefficace.

Je pars avec en mains un trophée me couvrant de ridicule. Un genre de radis géant qu’aurait cueilli une fourchette ad hoc dans un conte misérable, un cauchemar. Je me réfugie derrière la maison, mettre ce riquiqui dans un bout de terre moche, faite de mottes sèches et d’un peu de terreau que je lui verse comme une eau bénite, sans absolution.

Du plus profond de mes entrailles, rien ne me sera pardonné, non. La tête basse, j’avale mon dépit, je cours chercher une petite résurrection d’âme à l’intérieur de la maison, au frais, et je m’agite pour oublier.

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15 mai 2011

Grand ménage des femmes

Je ne sais pas pourquoi quand je me mets à faire un grand coup de ménage dans ma maison je pense à ma  soeur et à ma mère et à la maison d'Ajaccio.

J'ai des images de ma soeur ( aînée, onze ans de plus que moi, elle a l'âge de la retraite) frénétique, la tête dans la poussière des vieux placards. J'ai des images de ma mère et le plaisir de remuer les antiquités de la vieille maison familiale de son île. Dans ces moments là, ensemble, je crois qu'il y avait tout un courant de vie qui passait, très énergétique. On ne sentait pas la fatigue, on se dépensait, comme on dit.

Faut dire que la Mamie partie, la maison restait inhabitée dix mois sur douze. Alors y débouler à l'été c'était refaire sa vie, lui redonner de nous, la faire sourire et débusquer encore des secrets.

Je dis "maison" parce que c'est immense, mais c'est en fait un étage, sur les trois que comporte cette jolie batisse florentine aux murs roses, face au port. Balcons et escaliers de marbre. Moulures au plafonds. l'appartement était si grand, petite je faisais du vélo dans le couloir, que le frère et la soeur l'ont coupé en deux il y a trente ans, à la mort de leur mère, ma grand-mère.

Dans sa forme d'origine c'était un dédale. Couloirs, boudoir, grandes pièces de rangement à l'entrée des chambres avec fioles et bocaux en verre du grand-père médecin. La maison servait aussi de cabinet de consultations. La plaque en marbre avec son nom est toujours sur la rue devant la porte d'entrée.

Immense salon avec son luxueux lustre haut perché plein de gouttes de verre. Une vraie salle de bal pour la petite fille que j'étais et qui pianotait ses compositions sur le vieux piano droit, concentrée au possible et un peu ennuyée par les longues siestes des grands. C'est long, que faire ? On ne va pas à la plage après le repas, on se repose. Mais on y restera ensuite jusqu'au coucher du soleil.

Je nous vois avec ma mère perchées sur des échelles pour atteindre des placards, des trappes, en hauteur, des endroits remplis de merveilles : vêtements d'un autre temps, objets parfois bizarres, meubles, bibelots merveilleux.

Je nous vois laver à grande eau les tomettes rouges. Autrefois la grande cuisine donnait sur la ruelle où on faisait sécher le linge sur un fil qui glissait entre la voisine d'immeuble et nous. Comme en Italie, et comme à Montréal aussi, chez mon amie. Les draps flottants comme des drapeaux en haut des ruelles. Les ruelles qui sentent la pisse. Derrière la maison un petit passage qui mène à une rue très commerçante où mamie avait ses habitudes. Toujours une chaise en paille cabossée et qui sent l'osier pour s'arrêter au perron de l'épicière et papoter. "Ah c'est votre petite fille !!". La petite-fille était fière et puis je porte le prénom de cette grand-mère, ça personne ne pourra me l'enlever.

Car la maison familiale je l'ai laissée à mon frère qui a préféré tout garder. Et nous ne sommes pas du genre à passer des vacances ensemble, pas du tout du tout. Il a donc tout racheté. Peu importe, les souvenirs je les ai et cet endroit est mien pour toujours grâce à ce que j'y ai vécu, uniquement moi avec moi.

C'est vrai que c'était plutôt une maison de femmes. C'est sans doute pour cela que j'ai gardé les images fortes de ces femmes fortes qui s'y agitent et rangent, trient, lavent, poussent, déplacent, cherchent, re rangent, organisent les choses, leur donnent forme et goût. C'est aussi pourquoi je sais combien ma soeur va souffrir de ne plus y être chez elle. Une blessure sans fond qu'elle n'a pas su voir venir, qu'elle va subir. J'aimerais la consoler de cela mais c'est encore trop tôt, le lot des failles creusées après les deuils a emporté nos compassions. Des choix trop difficiles entre nous, pleines d'incompréhensions.

Ma grand-mère avait sa chambre au fond, avec de lourds rideaux roses ancien, soyeux ,et personne n'entrait dans son antre. C'est elle qui t'y emmenait. Tu savais alors que quelque chose t'attendait. Préméditation, excitation, chuchotements. "Tiens, je vais te montrer" "Tiens, tu peux prendre ça". Une photo, un objet, un vêtement, une petite boîte avec un billet. Et des baisers très mouillés.

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4 mai 2011

Journal de campagne.

Il a plu hier, elle m'a prise de surprise, au volant, au tournant.
C'est toujours au même endroit. La plaine quittée, il y a ce tournant où tu ouvres la fenêtre, enfin la vitre  ( au volant, dis je...) et l'odeur d'humide s'infiltre dans tes narines.
C'est un endroit où tout bascule. Adieu sécheresse et mistral. Le buis, les rivières, les eaux vertes, les mousses. C'est ce que te disent tes narines dès ce premier tournant.
Plus tard, plusieurs virages après, tu traverses le pont, et les pattes d'éléphant du Vercors te salueront.

Hier dans le virage qui te fait changer de tout, les gouttes sur le pare-brise. La pluie était décidée. 

J'allais à ma banque-du village. Là j'ai entendu une dame dire "Non, c'est juste une petite pluie." Elle savait mieux que moi, elle est de là. Moi, venant de la plaine, je trouvais cette pluie une aubaine. Je trouvais qu'elle mouillait, même courte, je la trouvais forte.

Tout est relatif mon zami. Tout dépend d'où tu viens et où tu crois aller. A partir de là, rien n'est réalité, tout est subjectivité. Ce que je vois, ce que je sens, n'est pas ce que tu vois ni ce que tu sens.
Comment vivre ensemble alors ? Comment partager, coexister, faire démocratie,  affirmer collectivement, par exemple ?

Pour te faire rire, je reviens à ma banque. Enfin "cette" banque. Je n'ai aucun contact précis de près. En ce moment, très provisoirement.., il y a des pépéttes sur mon compte, j'achète un bien, alors je me suis tapée un rendez-vous et deux accueils au guichet.
J'ai pensé aux Monty Pithon et tous ces sketches dont seuls les english ont le don, en tout cas celui de me faire pisser de rire.

Hier il y avait tout pour. Le gars à l'accueil doit être un repêché du Pôle emploi. La cinquantaine, casable nulle part. Il n'a plus d'ongle, ce sont des bouts de trucs froissés au bout de ses doigts, recouverts d'un genre de vernis. Il tape avec un doigt, pété de trouille sur l'ordi. Il est pathétique. La dernière fois c'était pas mieux, la demoiselle s'était trompée d'un zéro pour enregistrer mon chèque. Un genre de blondasse sortie d'une Loft story. Et qui voulait un rendez-vous avec moi pour parler placement !?? Non mais c'est une plaisanterie ?? Où est la caméra cachée que je me marre pour de vrai !??

Toujours est-il qu'hier la directrice a repris en main les affaires car le gars a passé dix minutes à taper trois trucs et a constaté qu'il " n'avait pas la délégation, je ne peux pas le faire"

( Oui, oui, j'avais vu avant toi que tu ne le ferais pas mon pôvre RoToto...)
Me voilà dans le bureau de la dirlo herself. Elle aussi elle est sortie de la Ferme des celebrity ou quoi ? Tenue de minette, ton de télémarketing, sourire dentifrice. Mielleuse et mauvaise comédienne...mais sachant taper avec toutes ses mains et ne se trompant pas dans les chiffres. Ca doit être ça le critère pour être directrice d'une mini agence.

J'ai été très vilaine. Pas voulu lui faire une conversation de people de chez Farfouille-mes-oies. J'ai à peine souri, j'avais pas trouvé la caméra caché, la reality du moment me rendait un peu chaffouin.

Ouf ! sortie de là, plus de pluies mais j'aimais bien. Suis allée chez le quincaillier-droguiste-plombier-zingueur- du village. Ouf, là j'ai trouvé des vrais professionnels pleins de bon sens et pas lèche-bottes. Ca faisait du bien.

Bon, quoi vous mettre comme photo pour tout ça ? Je ne vois pas...
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